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Après l’adoption – bienvenue - de la nouvelle réglementation européenne « zéro-déforestation », les producteurs risquent une double peine.

A l’approche des fêtes de fin d’année, les Français se préparent à acheter du chocolat en conséquence, du chocolat…non durable. En effet, cette consommation prévisible et massive de chocolat non-durable révèle d’énormes « coûts cachés » : coût social de la pauvreté, du travail des enfants, coût environnemental de la déforestation, entre autres. Afin de lutter précisément contre la déforestation, l’Union européenne a adopté un nouveau règlement en 2023, pour que les produits de plusieurs filières, dont le cacao, entrant sur le marché européen soient « zéro-déforestation ». Mais lutter efficacement contre la déforestation implique de lutter aussi contre ses causes profondes. A l’occasion de la Journée Mondiale du Cacao, Max Havelaar France interpelle les pouvoirs publics et l’industrie sur les moyens alloués aux cacaoculteurs pour leur permettre de répondre aux exigences de ce nouveau texte. Il n’y aura pas de durabilité environnementale sans durabilité sociale et économique : la possibilité pour les producteurs et productrices de gagner suffisamment leur vie est un élément clé et une condition préalable vers une production de cacao durable et zéro-déforestation. Le commerce équitable répond à ces enjeux.

Une nouvelle réglementation européenne pour lutter contre la déforestation importée

L’Union européenne vient d’adopter un nouveau règlement qui oblige les entreprises à prouver que les produits mis sur le marché européen ne sont pas à l’origine de déforestation. Il leur faudra donc tracer l’origine des produits depuis la parcelle de terre où ils ont été produits. Cette nouvelle règlementation vise, en partie, à protéger les forêts, qui assurent des moyens de subsistance à l’équivalent de près de quatre fois la population de l'Union européenne.

Néanmoins, la nouvelle réglementation s’appuie sur un dispositif de traçabilité, technique et humain, et cela a un coût. Or, la grande majorité des 5 millions de petits producteurs de cacao sur lesquels repose la production, vivent dans des conditions de pauvreté liées au prix très bas payé pour les fèves. Ils sont extrêmement vulnérables, accablés par l’insécurité économique et les impacts croissants du changement climatique. Le respect de ce nouveau règlement, demande des moyens financiers bien au-dessus de ce dont ils disposent.

Pour exporter vers l’Europe, les coopératives de cacao seront obligées de mettre en oeuvre des outils, souvent digitaux, de cartographie complexe, y compris des données GPS. Ils devront télécharger des données de traçabilité, permettant de comparer la localisation des parcelles agricoles et des photos satellites des forêts classées. Les cacaoculteur·rice·s, qui disposent, dans leur majorité, de faibles ressources, craignent de rencontrer des difficultés pour authentifier leur respect des normes environnementales et ne sont pas en mesure, aujourd’hui, de prouver leur conformité.

En Côte d’Ivoire, 77% des producteurs et productrices de cacao vivent en dessous du seuil de pauvreté. La spéculation et la concentration des grandes entreprises (traders, transformateurs…) dans cette filière déséquilibre le rapport de force, déconnecte des prix pratiqués en bourse des coûts de production, et sont l’une des causes de la pauvreté endémique des producteurs depuis des décennies.

« Choisir entre nourrir sa famille ou lutter contre la déforestation, ce n’est pas un choix ! Il faut donner davantage de moyens économiques aux producteurs ! », explique Blaise Desbordes, directeur général de Max Havelaar France. « Les cacaoculteur·rice·s, en situation de pauvreté, ne peuvent pas investir, en l’état actuel, dans des méthodes de production plus efficaces et durables. Assurer un revenu minimum vital est la condition sine qua non pour de la durabilité, et le premier pas pour faire face aux problématiques environnementales et sociales de la filière. »
C’est pourquoi Max Havelaar France demande à l'Union européenne, mais aussi aux entreprises, de veiller à ce que toutes les mesures adoptées dans la législation contre la déforestation incluent l'équité et la justice sociale comme éléments essentiels1. L’association réclame une étude immédiate sur le nombre d’exploitants de cacao qui risquent d’être impactés. Cette étude permettrait de répondre, par des mesures urgentes et significatives, aux besoins de la mise en conformité des petits exploitants.

Le chocolat équitable est la meilleure voie pour un cacao durable et des conditions de production décentes

L’un des principaux leviers pour faire face à la pauvreté endémique des cacaoculteur·rice·s et pour rendre la filière du cacao durable est l’évolution de la filière vers une valeur mieux répartie, de manière équitable. Elle doit comporter un revenu vital pour le travail des cacaoculteurs, qui ne touchent qu’environ 7% de la valeur d’une tablette quand la distribution (40%) et la fabrication (40%) s’arrogent la part du lion. Cette rémunération suffisante pour assurer aux producteur·rice·s et aux travailleur·euse·s et à leur famille des conditions de vie décentes, est un droit humain reconnu par l’ONU et l’Organisation Internationale du Travail (OIT).

Malgré un marché équitable en forte croissance en 2022 (+19%) la consommation du cacao issu du commerce équitable reste un acte trop limité en France : sur 11kg de chocolat que consomme un foyer par an, seuls 700 grammes sont équitables. « Les producteurs de cacao ne reçoivent aujourd’hui que 7% du prix payé par les consommateurs sur les tablettes. Alors qu’attendons-nous pour faire bouger ce chiffre et leur permettre de vivre décemment ? » interpelle Blaise Desbordes, directeur général de Max Havelaar France. « Le secteur du cacao compte des acteurs économiques importants, les produits innovants arrivent sur le marché, la consommation continue de progresser…mais le secteur repose sur une production de cacao massivement non-durable ! ».

Le commerce équitable repose sur des conditions strictes, contrôlées par un organisme de certification indépendant. Fairtrade/Max Havelaar impose de payer un prix minimum rémunérateur au producteur pour apposer son label. Le cahier des charges permet une amélioration durable des conditions de vie grâce à une prime de développement, et encadre les pratiques agricoles durables.

Sans les consommateurs les lignes ne bougeront pas ! Max Havelaar France lance sa campagne d’interpellation : « Le chocolat ça tâche !»

A l’occasion de la Journée mondiale du cacao, dimanche 1er octobre, Max Havelaar France a lancé la campagne « qui fait tache » pour dénoncer les conditions de travail et de vie des producteur·rices de cacao.

ANNEXES

En France, en 2022, le marché du chocolat équitable Max Havelaar a progressé de 19% :

  • 2 196 produits labellisés contenant du cacao Fairtrade/Max Havelaar étaient commercialisés sur le marché français en 2022. Ces produits sont très variés et peuvent aller de la traditionnelle tablette de chocolat à la pâte à tartiner ou encore aux glaces.
  • Plus de 15 400 tonnes de fèves de cacao ont été vendues aux conditions du commerce équitable Fairtrade/Max Havelaar en France.
  • Les enseignes à dominantes marques propres comme Aldi, Lidl et Action, connaissent de bonnes performances avec une hausse de 19% de leur chiffre d’affaires généré par la vente des produits chocolatés labélisés Fairtrade/Max Havelaar.

Déforestation : Le couvert forestier naturel de la Côte d’Ivoire a diminué d’environ 90% au cours des 30 dernières années et de 65% au Ghana2 en grande partie à cause de l’augmentation incessante de la production de cacao. Les cacaoculteur·rice·s où qu’ils ou elles soient, sont donc déjà confronté·e·s aux impacts de la déforestation :

  • Extinction de certaines espèces végétales et animales : en Côte d’Ivoire par exemple, il ne reste plus que 1 000 chimpanzés et 200 éléphants de forêt.
  • Perte des moyens de subsistance des populations qui dépendent des ressources forestières pour leur alimentation, leur combustible, leurs soins et leurs matériaux de construction
  • Les pluies sont moins nombreuses et plus difficiles à prévoir : la déforestation à grande échelle est susceptible de perturber la circulation de l’humidité atmosphérique en Afrique de l’Ouest, où plus de 70% du couvert forestier a disparu. En effet, une perte du couvert forestier tropical d’environ 50% entraîne une augmentation locale de la température d’environ 1°C.
  • Augmentation des agents pathogènes potentiellement mortels.
  • Perte de systèmes d’absorption et stockage de carbone

À propos de Max Havelaar France
L’ONG Max Havelaar France, membre fondateur du mouvement international Fairtrade, agit pour un commerce équitable, respectueux des droits humains et de l’environnement. Avec le label Fairtrade/Max Havelaar, elle mobilise les entreprises, les consommateurs et les pouvoirs publics afin de transformer les pratiques et de soutenir les producteurs et travailleurs défavorisés. Elle sensibilise l’opinion publique et milite en faveur d’une économie mondiale éthique et responsable. Pour en savoir plus : www.maxhavelaarfrance.org/actualites/presse/


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