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Le marché bio est confronté actuellement à une crise majeure inédite. Le réseau spécialisé, dont c’est le cœur même de l’activité, en est la première victime, comme les producteurs et les transformateurs.

En 2020, le marché alimentaire bio avait progressé de plus de 12 %, atteignant 13,2 Mrd €. Un record. Mais il avait reculé en 2021 pour la première fois de son histoire, avec seulement 12,8 Mrd €. Une chute surtout due, selon l’Agence Bio, à une baisse du CA de la GMS de 3,9 % et du réseau spécialisé de 1,8 %. Seuls les artisans (+6 %) et la vente directe (+8 %) avaient alors progressé, ainsi que la restauration collective (+30 %) et commerciale (+8 %). En 2022, nouveau recul d’environ -7 %, avec des ventes estimées à 12,1 Mrd €. Fini les croissances annuelles à deux chiffres. Ce recul serait, selon de premières estimations, d’environ 5 % en GMS et de -12 % dans le réseau spécialisé. Certaines enseignes nationales ou groupements bio affichent même -15 % à -40 %.

Le coupable désigné de cet écroulement semble tout désigné : l’inflation. Or, selon une enquête récente NielsenIQ, 54 % des Français estiment que les produits bio sont trop chers par rapport aux bénéfices qu’ils apportent. Résultat, les consommateurs se détournent de ces produits aux prix plus élevés pour se tourner vers l’offre premiers prix, seuls les ménages aisés ayant stabilisé leurs achats bio.

La GMS, qui se détourne ainsi du bio pour se recentrer sur d’autres créneaux, avait pourtant été prompte à se précipiter sur la Bio quand elle la pensait profitable (comme elle l’a fait avec le vrac, le vegan, le local, mais aussi le halal ou, actuellement, les produits de seconde main…). Car en fait, l’objectif premier de la GMS, de l’avis de beaucoup, a toujours été, et sera toujours, le profit à court terme. Il n’y a qu’à regarder l’actualité et la pression sur les producteurs et les acheteurs quand il s’agit de fixer leurs prix d’acquisition. À rappeler d’urgence aux consommateurs sensibles au maintien du tissu économique local et des emplois de proximité.

Une autre cause de la baisse des ventes est la confusion créée par les labels qui se disent « durables » (HVE, « Zéro résidu de pesticides ») et « s’approprient les codes du label bio alors qu’ils sont loin d’offrir le même niveau d’exigence » comme le soulignent les représentants de la filière bio dans une lettre ouverte publiée fin novembre 2022. Il y a donc aussi urgence à (ré-)éduquer les consommateurs, qui ont montré durant la crise du Covid combien la santé est de plus en plus un enjeu essentiel pour eux.

Certains experts du marketing soulignent néanmoins que « l’expérience client peu convaincante » en magasin bio détourne aussi les consommateurs, entre manque de mise en scène et qualités organoleptiques parfois décevantes. Donner envie est essentiel, trop de magasins bio se contentant du strict minimum, tant en matière d’offre alléchante que d’impact visuel ou d’expertise sur les produits. Il suffit pourtant d’arpenter les allées d’un Natexpo ou d’un BioFach pour constater combien de marques savent faire en matière d’originalité, d’innovation, de local et de gourmandise, avec des produits qui ne sont pas justes des « clones bio » de leurs équivalents conventionnels, et qu’on a tous envie d’acheter. Il y a également urgence à investir dans cette dimension-là. La Bio doit être « désirable », méritant alors d’être si nécessaire payée plus cher.

© lmage fxquadro via Freepik


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